
Imperial 1955-56 : ambitions contrariées
Le Journal de Montréal
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la croissance revient en Amérique du Nord. Histoire d’aller chercher la dominante General Motors, les deux autres grands de Detroit débordent d’ambition et se mettent en tête de créer une structure de marques identique, soit en avoir cinq. Pour Ford, cela entraînera l’ajout de Continental en 1956 et d’Edsel en 1958. Pour Chrysler, ce sera Imperial. Mais tout ne va pas se passer comme prévu, ni pour Ford ni pour Chrysler…
Chrysler Corporation sera fondée en 1925 sur les restes de Maxwell Motor Company. Chrysler, la marque, avait été introduite en 1924. Dès la première année, un modèle baptisé Imperial faisait partie de la gamme. Il faut attendre 1926 pour qu’Imperial devienne une série à part entière, tout en haut de la gamme Chrysler. Cette situation va perdurer jusqu’en 1954. Selon les années, il y aura plus ou moins de modèles et de carrosseries disponibles.
De 1946 à 1950, le nom Imperial est réservé à des berlines à empattement allongé, les Crown Imperial. En 1951, la gamme Imperial est redéveloppée (4 versions) et les Crown Imperial subsistent. En 1953, les Imperial deviennent Custom Imperial (voir photo ci-dessous). Reste maintenant à parler de Chrysler, la compagnie, dans les années 50.
Pour comprendre l’état d’esprit de la société, il faut remonter aux années 30 et au désastre des Airflow. Présentés en 1934, ces modèles ont été dessinés pour être le plus aérodynamiques possible. Révolutionnaires à l’époque, ils ont malheureusement été boudés par les acheteurs et ont été arrêtés en 1937. Cet échec va faire rentrer Chrysler dans une attitude de conservatisme esthétique. Conservatisme renforcé par le président de la compagnie, K.T. Keller. Nommé en 1935 pour remplacer Walter P. Chrysler, il ne s’intéresse qu’à la technologie et pas du tout au design. Après la guerre, alors que les lignes de toit commencent à s’abaisser, il demande que l’on puisse continuer à entrer et sortir des Chrysler avec un chapeau sur la tête. Bien conçues et bien construites, les Chrysler 1949-54 vont moins résonner avec le public car d’allure très conservatrice alors que GM sonne la charge sur le plan du design (avec les premiers ailerons sur les Cadillac pour ne donner qu’un exemple).
Mais Keller n’est pas obstiné et observe la tendance. Six mois après le lancement des Chrysler 1949, il décide d’embaucher le second protagoniste de notre histoire : Virgil Exner. Originalement illustrateur, Exner rentre chez GM comme designer en 1934 et prendra rapidement la tête du studio Pontiac. En 1938, il est engagé par le dessinateur industriel Raymond Loewy qui a un contrat avec Studebaker. En 1944, il signe un dessin directement pour Studebaker sans que Loewy ne soit au courant. Furieux, il le licencie et Exner part travailler directement pour la marque de South Bend. Et c’est en 1949 qu’il accepte l’offre de Chrysler.
Au début, Exner n’est en charge que du studio de design avancé. Son rôle est de créer des concepts (véhicules idées comme il les appelait) sans être impliqué dans les modèles de production. Il en imaginera de nombreux, dont le Chrysler Norseman qui finira au large des côtes du Massachusetts après un naufrage, généralement avec la collaboration du carrossier italien Ghia.
Parmi ces voitures idées, deux vont avoir de l’importance pour la suite des choses : la K-310 de 1951 (voir photo ci-dessous, en haut) et l’Imperial Parade Phaeton de 1952 (voir photo ci-dessous, en bas).
