
Bon anniversaire, M. Dostoïeveski!
Le Journal de Montréal
Le 11 novembre, l’un des plus grands romanciers de la littérature mondiale, Fiodor Dostoïevski, aurait eu 200 ans.
C’est pour célébrer cet anniversaire que la Comédie française présente la pièce Les démons, adaptée du roman de Dostoïevski par le dramaturge flamand Erwin Mortier, traduite en français par Marie Hooghe et mise en scène par Guy Cassiers, un autre Flamand. Mais quelle pertinence peut encore avoir pour nous un roman écrit il y a un siècle et demi ?
Je suis loin d’être un fin connaisseur du romancier russe. À vrai dire, j’ai commencé à lire ses romans les plus connus quand j’étais dans la vingtaine. Sauf pour Crime et châtiment, je n’en ai terminé aucun autre. Tous sont trop longs à mon goût et habités par tant de personnages que je finissais par m’y perdre.
Que vous ayez lu Dostoïevski ou non, il est impossible que vous ayez pu lui échapper si vous aimez le cinéma. Une cinquantaine de films furent adaptés de ses romans, dont huit pour Crime et châtiment seulement. Richard Brooks, Kurosawa, Visconti, Bertolucci, Kaurismaki, Godard, Bresson et Wajda comptent parmi les réalisateurs les plus connus ayant puisé leur inspiration chez Dostoïevski. Il ne lui manque qu’une adaptation de Denis Villeneuve !
En raison de la pandémie, je n’avais pas mis les pieds à Paris depuis près de deux ans. Pas plus qu’à la Comédie française, que les Parisiens appellent simplement « Le Français ». Même si son vieux fauteuil est encore exposé dans le foyer du théâtre, Molière n’a jamais foulé la scène de la salle Richelieu. Elle fut inaugurée en 1790, donc plus d’un siècle après sa mort.
AUCUN SIGNE DE LA PANDÉMIE
Jeudi dernier, à l’exception des masques et du « pass sanitaire » (eh oui, encore un mot anglais !) qu’il fallait présenter à l’entrée, il n’y avait aucun autre signe visible de la pandémie. Les 2000 fauteuils de la salle étaient tous occupés lorsque s’ouvrit le rideau sur Les démons de Dostoïevski.
Les démons montrent la chute d’une société en train de pourrir. L’intrigue oppose une vieille génération – qui pourrait être celle de nos baby boomers – à une nouvelle génération, qui en a assez d’attendre le pouvoir et qui est prête à tout pour l’avoir, même si elle ne sait trop ce qu’elle en fera. Les costumes sont d’époque, l’intrigue ne saurait être plus russe, mais on fait rapidement le lien entre le populisme et le ressentiment qu’expose la pièce et les phénomènes sociaux et politiques que nous vivons aujourd’hui.
L’ÉMOTION FOUT LE CAMP
