
Fiasco SAAQclic: cinq révélations étonnantes à la commission Gallant
Le Journal de Montréal
Des révélations et des citations étonnantes – La semaine d’audiences de la commission d’enquête publique sur le fiasco SAAQclic a permis d’en apprendre plus quant aux circonstances ayant mené au cafouillage et à un dépassement de coûts de 500 millions $. Voici les éléments marquants des témoignages souvent hauts en couleur.
Dans un témoignage coloré, François Geoffrion, ex-membre du CA de la SAAQ, a soutenu que le projet SAAQclic avait «tous les défauts» dès le départ. «On savait que ce projet-là était très risqué, on s’est fourré», a affirmé l’expert en TI, évoquant un cruel manque de main-d’œuvre qualifiée. «Une grande partie des gens qui travaillaient là-dessus était en Inde.» Pour lui, la SAAQ s’est «fourrée deux fois»: d’abord en évaluant mal ses besoins, ensuite avec un déploiement catastrophique. «J’ai trouvé que la ministre [Geneviève Guilbault] avait l’air un peu surprise», a-t-il lancé, rappelant que les avertissements avaient pourtant été clairs.
Avant même les élections de 2022, le gouvernement Legault avait été informé que l’enveloppe budgétaire de SAAQclic était épuisée. Les sommes prévues au contrat de 2017 à 2027 ont été siphonnées en moins de cinq ans. «Ça veut dire, il faut que tu parles au ministère des Finances parce que tu vas emprunter plus que prévu», a affirmé l’ex-membre du CA François Geoffrion. Une note interne de septembre 2022 confirme que les «instances gouvernementales concernées ont été informées» des problèmes budgétaires de SAAQclic.
Avant même de signer le contrat, la SAAQ a gravement sous-estimé ses besoins en main-d’œuvre. Il manquait 800 000 heures pour compléter SAAQclic. «On était sur de mauvaises bases», a résumé François Geoffrion. En panique, la Société a puisé dans les fonds réservés à l’après-déploiement pour poursuivre le développement. Un règlement de 222 M$ supplémentaires a été conclu avec les fournisseurs LGS et SAP. Pour éviter l’attention médiatique, avant la campagne électorale, le paiement a été fragmenté afin que ce dépassement ne soit pas connu du public. «Tout le monde était découragé», a résumé la membre actuelle du CA Corinne Charette.
L’ex-président du CA, Guy Morneau, a minimisé les dépassements de coûts de SAAQclic: «Quand bien même que ça coûterait 50 M$, 100 M$, 200 M$ de plus... Ça n’empêchera pas la Terre de tourner.» Cette déclaration a fait sursauter tout le monde. Selon lui, ces sommes représentent une faible part des dépenses annuelles de la SAAQ. Le commissaire Gallant a rappelé que l’argent de la SAAQ appartient aux contribuables et que le rôle du CA est de s’assurer qu’il soit bien géré.
Karl Malenfant, l’ex-vice-président responsable de SAAQclic, a reçu une pluie d’éloges des membres du CA qui ont témoigné, malgré la cascade de difficultés qui a miné le projet. «Il avait une très belle personnalité (...) c’est un champion», a lancé André Caron, ex-membre du CA. L’actuelle membre du CA Louise Champoux-Paillé a admis que le projet était «complexe» et qu’elle n’était pas outillée pour remettre en question ses décisions technologiques. Le commissaire Gallant a résumé le manque de connaissances informatiques des administrateurs en suggérant qu’ils avaient dû faire «un acte de foi».
