Retour vers le futur aux Philippines avec l’élection du président Ferdinand Marcos
Radio-Canada
La journaliste philippine Maria Ressa, colauréate du prix Nobel de la paix 2021 et PDG du site d’information Rappler, a déclaré le 10 mai à CNN que l’élection de Ferdinand Marcos à la présidence de son pays « fait voir, non seulement aux Philippins, mais au monde entier, l'impact que peut avoir la désinformation sur une démocratie ».
Cette désinformation, dit-elle, déterminera l'avenir de ce pays, mais aussi, elle réécrit son passé. Les Philippines, immense État-archipel d’Asie du Sud-est, 110 millions d’habitants, ont en effet élu le 9 mai un nouveau président, avec un nom surgi d’un lourd passé : Ferdinand Marcos, fils du dictateur du même nom, au pouvoir avec sa famille dans les années 1960, 70 et 80.
Proche allié des États-Unis, d’abord élu démocratiquement en 1965, mais ayant vite basculé dans l’autocratie, la loi martiale et des détournements de fonds inouïs, Ferdinand Marcos avait été chassé par un mouvement populaire en 1986.
À l’âge de 64 ans, Ferdinand Marcos Junior, alias Bongbong, vient de balayer l’élection présidentielle, dans une féroce revanche sur le destin, sous le fier regard de sa mère Imelda Marcos, 92 ans, trépignant devant la victoire de fiston.
Trente-six ans plus tard, la famille retourne au Palais.
Marcos l’a emporté très nettement, avec deux fois plus de suffrages que sa concurrente la plus proche (30 millions de voix comparativement à 15 millions). C’est le retour au pouvoir d’une dynastie familiale et, selon Maria Ressa, le triomphe de l’amnésie collective.
Le système politique philippin est de type dynastique et hollywoodien, avec souvent comme acteurs principaux des people sans programme précis, à la Donald Trump.
Inspiré du système américain – avec quelques différences comme le mandat unique de six ans et l’élection séparée du président et du vice-président, qui peut parfois donner des duos dépareillés – ce système a aussi une touche latino-américaine : forte personnalisation du pouvoir, autour de quelques familles qui dominent de larges pans de l’économie, les médias et la représentation politique.
Par exemple, le président sortant Rodrigo Duterte, avec sa famille, domine les terres du Sud, notamment la grande ville de Davao, tandis que les Marcos viennent du Nord, de la grande île de Luzon où se trouve la capitale Manille.