Quand victimes et bourreaux rêvent d’une même terre promise en Colombie
Radio-Canada
« Buenas, Constanza! ¿Cómo le va? » Caché derrière des lunettes noires, l’homme serre quelques mains, mais ne s’arrête pas longtemps devant la petite maison.
Luis Hernando Tangarife a beaucoup à montrer ce matin. Il est venu constater l’avancée des travaux agricoles sur une petite terre d’à peine deux hectares, aux limites de Bogota.
C’est petit, reconnaît-il, mais c’est assez pour rendre bien fier cet ex-membre des FARC, la vieille guérilla qui a marqué la Colombie par la violence et la mort durant des décennies.
L’air est bon, explique celui qui est connu comme le prêtre. Venir ici le ramène aux origines de la lutte des FARC, au désir d’améliorer le sort des paysans. Sa première motivation.
Je rêve encore de changement, explique Luis Hernando Tangarife. Je travaille maintenant avec les victimes de la guerre. Je veux du changement pour tout le monde en Colombie.
C’est un travail à long terme. Sans les armes. Des germes d’espoirs dans un pays où trop de familles ont été déchirées par la violence, les enlèvements et les représailles.
La visite se poursuit : l’étang, les poulaillers, l’espace pour les cultures biologiques. Voici l’un des rares exemples concrets du complexe processus de paix entamé il y a plus de six ans entre les FARC et le gouvernement colombien.
Les guérilleros ont déposé les armes en 2016. En échange de promesses de réformes agraires et d’accès à un processus alternatif de peines, inspirées par la justice réparatrice.
Nous payons nos peines en participant à ce projet de réinsertion, rappelle Luis Hernando Tangarife. D’anciens guérilleros comme lui financent et gèrent la ferme.