Quoi penser des cadres financiers soumis aux Québécois jusqu’à présent?
Radio-Canada
Trois des cinq partis ont présenté leur cadre financier depuis le début de la campagne électorale au Québec, soit la Coalition avenir Québec, le Parti libéral et Québec solidaire. Que pensez de leurs propositions? Gérald Fillion s'est entretenu avec le fiscaliste Luc Godbout pour y voir plus clair, dans le cadre de son émission Zone économie.
Luc Godbout : Avant de faire un commentaire critique sur chacun d'entre eux, je voudrais peut-être rappeler en quoi consiste cet exercice. Un cadre financier, ce que ça cherche à faire, c'est de se comparer au statu quo, au rapport préélectoral, et dire : voici les changements qu'on veut faire. Donc ça permet une comparaison entre les propositions de chacun des partis. Au fil des années, ça s'est amélioré. Dans l'ensemble, c'est bien fait.
Pour Québec solidaire (QS), c'est la première année qu'ils le présentent sur cinq ans. C'est positif, parce qu'habituellement, ils présentaient seulement une année. Donc c'est un peu la fleur.
Mais sinon, est-ce que c'est faisable d'aller chercher près de 37 milliards sur quatre ans, soit près de 10 milliards par année de nouvelles recettes? Ça serait tout un défi. Donc le cadre financier de Québec solidaire est peut-être un peu ambitieux, et je pense qu'ils ne s'en cacheront pas, ils vont être d'accord. Mais il y a quand même une difficulté.
Du côté des libéraux, la critique ce serait que, sans explications, les provisions « mesures COVID » pour cette année et les provisions pour risque économique et relance, soit deux milliards par année pendant cinq ans, elles disparaissent dans leur cadre financier. Elles ne sont plus là, malgré le déficit plus élevé. Ça veut dire que s'il arrive une récession, la marge de manoeuvre pour y faire face, elle est absente.
Du côté du cadre financier de la Coalition avenir Québec (CAQ), je ferais la même critique que celle que j'avais formulée au ministre sortant des Finances en 2018, le libéral Carlos Leitão... C'est son ministère qui prépare le rapport préélectoral, mais deux semaines plus tard ils arrivent en disant qu'ils vont avoir de la croissance économique plus élevée que ce qui est écrit dans le rapport préélectoral, parce que ça donne des recettes additionnelles. C'est sûr que c'est une critique qu'on peut formuler.
Cela dit, c'est quand même bien indiqué dans leur cadre financier; il y a une ligne à part qui montre quelles sont les recettes accrues, comme ça on peut les soustraire facilement pour calculer le déficit sans croissance économique accrue.
Oui, mais ils cessent les versements au Fonds des générations. S'ils avaient maintenu les versements, ils auraient les mêmes déficits que ceux estimés dans le rapport préélectoral. Mais c'est le seul parti, parmi les trois, qui n'aggrave pas les déficits pour les deux ou trois prochaines années.
C'est normal de discuter du Fonds des générations parce que les cibles qui ont été fixées dans la loi, au départ, autour de 2007, elles vont être atteintes au cours du prochain mandat. C'est donc normal de vouloir en discuter, mais est-ce qu'une campagne électorale c'est le bon moment? Ça, je ne sais pas.