Contre vents et marées, on consomme!
Radio-Canada
Je regarde les chiffres de Statistique Canada sur les ventes au détail au pays depuis le début de l’année. Et, de mois en mois, je constate que les ventes dépassent les 60 milliards de dollars. Vous avez bien lu : 60 milliards de dollars, chaque mois, en moyenne, malgré l’inflation, malgré les craintes de récession et, permettez que je vienne ajouter, malgré la crise écologique.
Les ventes au détail ont baissé en septembre, rapportait Statistique Canada cette semaine, en recul de 0,5 %. Mais ces ventes totalisent pour les 30 jours de septembre pas moins de 61,14 milliards de dollars en données désaisonnalisées. Depuis juin, il y a une petite glissade des ventes au détail au Canada. Mais elles demeurent tout de même plus élevées que l’hiver dernier, où l’inflation était déjà à environ 5 %, juste avant le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui a poussé l’inflation jusqu’à 8 %.
La solidité des ventes au détail s’explique, bien sûr, par la hausse des prix. Mais elle s’explique aussi par la capacité, pour une partie de la population, à maintenir un niveau de consommation habituel, sans même renoncer à certains choix. Si l’inflation frappe les ménages à revenus modestes, elle ne freine pas l’élan de celles et ceux qui ont pu épargner, qui ont conservé leur emploi et qui prévoient même voyager dans le temps des fêtes.
Récemment, à Zone économie, le patron d’une association d’agences de voyages nous disait d’ailleurs que la demande ne faiblissait absolument pas en vue de la période des fêtes, que les gens étaient même prêts à payer plus cher pour aller dans le Sud que par le passé.
Pourquoi? Parce que la pandémie a frappé fort et a privé les Canadiens de pouvoir fêter Noël comme ils le voulaient, dans la joie et le plaisir, avec parents et amis, depuis deux ans. De toute évidence, bien des gens ne veulent pas se voir confisquer leur temps des fêtes pour une troisième année de suite, que ce soit par la COVID ou par l’inflation.
Ensuite, il faut bien le dire : fondamentalement, rien, mais absolument rien n’est fait pour changer, modifier, réévaluer nos choix de consommation malgré l’urgence climatique de notre époque. Alors que la dernière conférence sur le climat, la COP27, s’est terminée sur un résultat sans grandes ambitions, une fois de plus, il n’y a rien dans l’espace public et surtout dans le discours politique qui nous appelle à faire d’autres choix de consommation, plus écologiques, moins destructeurs pour l’environnement.
Celles et ceux qui appellent à des choix courageux, nécessaires pour changer l’ordre des choses, ne sont pas vraiment entendus. Les gouvernements misent essentiellement sur la technologie pour affronter le défi climatique. Pas de nouvelles cibles de réduction, pas de décisions exigeantes, et des émissions de gaz à effet de serre qui continuent de monter, alors qu’elles devraient déjà être en chute libre pour espérer atteindre la cible de 2030 et limiter le réchauffement, déjà catastrophique, du climat à 1,5 degré Celsius.
Alors, encore cette année, les prévisions de ventes pour le Vendredi fou – dont les publicités tapissent les journaux, résonnent à la télé et à la radio – sont exceptionnelles, tout comme les projections pour l’ensemble du temps des fêtes.
Ainsi, selon l’enquête annuelle du Conseil québécois du commerce de détail (CQCD), diffusée le 10 novembre dernier, à peine 35 % des Québécois prévoient moins dépenser cette année pour le temps des fêtes, ce qui est une hausse de seulement 5 points de pourcentage par rapport à l’année précédente.