Suicide dans les communautés autochtones : « sujet tabou », prévention à bout
Radio-Canada
Alors que la Semaine nationale de prévention du suicide s’amorce officiellement dimanche, Jean-François Girard, travailleur social de première ligne à Kuujjuaq, au Nunavik, déplore que ce fléau soit encore tabou.
Il y a une vraie omerta dans les communautés, relate cet intervenant mohawk embauché comme « travailleur de rue » au Centre de santé Tulattavik de l’Ungava en 2019.
En trois ans de service à Kuujjuaq, M. Girard a dénombré une trentaine de suicides dans le secteur qu’il couvre. C'étaient majoritairement des hommes, dit-il, âgés de 22 ans à 57 ans. Il ne les connaissait pas personnellement, mais il leur avait déjà parlé.
Quatre suicides sont survenus au cours des deux mois qui ont précédé Noël.
Les aînés sont conscients que le problème est présent, assure-t-il en nous confiant pourtant ne pas être capable d’en parler avec eux. Peut-être ont-ils peur que si on en parle, ça s’empire?
Au sein de communautés tissées serré où tout le monde se connaît, un suicide provoque une onde de choc immense, explique à son tour Jérôme Gaudreault, directeur général de l’Association québécoise de prévention du suicide.
Ça peut être un cousin, un proche, et cette proximité augmente le stress dans les communautés, ce qui complique le travail de prévention, reconnaît M. Gaudreault.
« Il faut que les leaders autochtones se lèvent et s’impliquent. Pour l’instant, c’est tabou. Mais à un moment donné, ils n’auront pas le choix d’en parler. »
Dans les faits, Jean-François Girard intervient surtout dans l’ombre des réseaux sociaux pour déceler les cas de détresse psychologique parmi les messages publiés. Il oriente ensuite les personnes concernées vers les ressources disponibles, qu’il s’agisse de cas de violence conjugale, d’agressions sexuelles ou de pensées suicidaires.