Difficile de démontrer que la Loi sur les mesures d’urgence est nécessaire
Radio-Canada
Les députés de la Chambre des communes poursuivent dimanche leurs débats sur la pertinence de l’utilisation par le gouvernement Trudeau de la Loi sur les mesures d'urgence. Pour recevoir l’appui des partis d’opposition, les libéraux doivent prouver que leur geste était indispensable, une chose « difficile » à faire dans les circonstances, pense le professeur titulaire à la faculté de droit de l’Université Laval, Patrick Taillon.
M. Taillon explique, en entrevue à D’abord l’info, que lors de la réécriture de la Loi sur les mesures de guerre en 1988, qui est devenue la Loi sur les mesures d’urgence, on a tellement voulu encadrer les circonstances associées à la mise en œuvre de cette loi qu’il faut maintenant avoir des raisons très graves pour se permettre de l’invoquer.
Pour rencontrer le haut standard exigé par la loi, il faut presque qualifier les manifestants de terroristes, ce qui me semble un peu tomber dans l’exagération. […] La menace dont il faut faire la preuve est loin d’être évidente ici, et elle force un peu le gouvernement à durcir le trait sur son ampleur.
Ainsi, il ne suffit pas de se dire que la loi a été utile, mais bien qu’elle était nécessaire ou indispensable.
C’est là que le gouvernement est en position de faiblesse, parce que c’est difficile de prouver que c’est indispensable et nécessaire quand on n’a pas utilisé dans les 14 premiers jours de la crise les instruments juridiques normaux, dit-il.
La Loi sur les mesures d’urgence donne les coudées franches au gouvernement et celui-ci peut l’utiliser quand il le décide. Les parlementaires doivent juger après coup de la pertinence de la décision, et le Parlement et le Sénat se doivent de débattre de son adoption dans les sept jours suivants.
Le propre du pouvoir d’urgence, c’est de donner un chèque en blanc au gouvernement pour pouvoir agir vite fait, bien fait quand les circonstances l’imposent, indique Patrick Taillon.
La question est maintenant de savoir si le Parlement acceptera que l’état d’urgence soit maintenu pour au moins 30 jours, ce qui est prévu par la loi et semble être l’intention du gouvernement.
Le ministre de la Santé publique, Marco Mendicino, a en effet déclaré que la Loi sur les mesures d’urgence allait être maintenue tant et aussi longtemps qu’elle sera nécessaire.