
« Habiter » le créole pour le faire vivre dans sa diversité
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«La langue est un pilier pour exister et s’exprimer en tant qu’humain et en tant que société». C’était l’un des messages à retenir de la causerie sur le créole, organisé le 3 novembre dernier dans le cadre de la 4e édition du FestiTeyatKreyòl, au Centre Toussaint.
Le créole «fait notre fierté [et] ce n’est pas juste une langue mais une culture», a expliqué Nerlande Gaëtan, directrice générale du festival. D’autres participantes ont renchéri: «Les créoles ne sont pas que des dialectes mais bien des langues à part.»
Manno Ejèn, un poète et essayiste présent sur le panel, a raconté qu’il avait été obligé de parler français à l’école durant sa jeunesse. Une participante a aussi confié qu’elle avait été forcée de parler français en pensionnat à Haïti et qu’elle était punie si elle s’exprimait en créole.
Sur le sujet de l’obligation de parler le français, Mme Gaëtan a parlé du fait que certains parents, dans un contexte d’immigration dans un pays étranger, interdisent à leurs enfants de parler créole.
Pour Sandra Rabrun, coordonnatrice du Sommet socioéconomique pour le développement des jeunes des communautés noires et qui animait la discussion, obliger des enfants à abandonner le créole pour utiliser uniquement le français «c’est comme si le seul moyen de s’exprimer, c’était dans une langue étrangère imposée par des colons».
Agnès Anestin, une autre intervenante qui est linguiste, a pointé du doigt le fait que le français soit la langue officielle d’Haïti et que le créole soit considéré comme ayant un «statut inférieur». À cet égard, Mme Gaëtan a rappelé que 90% des Haïtiens parlent pourtant le créole.
«Cessons de dire que des langues sont fausses. Le français n’est pas arrivé comme ça, il puise ses racines dans le latin. Toutes les langues se construisent. Il n’y a pas de mal à emprunter les mots d’une autre langue, pourvu que ces mots soient habités. On le voit dans la pluralité de la langue créole. Il n’y a aucune honte à ce que le créole soit en construction», affirme Sandra Rabrun.
