
Vladimir Poutine et l’Ukraine : un pas décisif vers la guerre?
Radio-Canada
Le président russe Vladimir Poutine a probablement franchi, le 21 février au soir, un pas décisif et totalement assumé vers ce qui ressemble de plus en plus à une guerre entre la Russie et l’Ukraine. Une guerre sous couvert de « mission de maintien de la paix », comme a été rebaptisé de façon orwellienne le bataillon russe dépêché au Donbass. Mais une guerre quand même, avec une armée qui franchit une frontière internationale.
Le contenu tout comme le ton de son discours d’une heure ne laissaient aucun doute. Il a dit que l’Ukraine n’est pas un pays, qu’elle a été complètement créée par l'Union soviétique, par Lénine et les bolchéviques, accusés au passage d’avoir totalement erré en créant cette entité qui n’a aucun sens.
Il a répété ses allégations incroyables et dénuées de fondement – déjà faites la semaine précédente en présence, outrance ultime, du chancelier allemand Olaf Sholtz – sur un supposé génocide qui serait en cours contre les russophones d’Ukraine.
Il a accusé les Occidentaux qui ne veulent pas d’un grand pays souverain comme le nôtre d’avoir réduit les Ukrainiens au statut de laquais des Américains. Il a présenté les dirigeants prooccidentaux élus d'Ukraine comme des agresseurs – même si c’est bien la Russie qui a amassé entre 150 000 à 190 000 soldats autour de l'Ukraine, et non l’inverse.
Ce faisant, Poutine tire un trait sur toute solution diplomatique à la crise. Avec ce discours enflammé, amer, sans compromis, acrimonieux, paranoïaque (selon l’Élysée rapportant les propos d’Emmanuel Macron), un discours truffé de mots comme folie, injustice, trahison, génocide (GUÉ-NO-TSID en russe). On est entré dans une autre dimension : le spectre de la guerre réapparaît en Europe.
Ce discours très violent a donc culminé, dans ses dernières minutes, dans l’annonce de la reconnaissance des soi-disant Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk, dans le Donbass, suivi du déploiement de l'armée russe dans ces territoires.
Exit, donc, la possibilité d’une solution intermédiaire, d'un compromis que ce soit sur l’intégration de l’Ukraine à l’OTAN (dont il n’était d’ailleurs plus vraiment question à court ou moyen terme), sur la limitation des armements et la transparence des forces armées (idées avancées et réitérées par Washington et l’OTAN), ou encore sur une solution spécifique au Donbass, à laquelle certains voulaient encore croire jusqu’à ces derniers jours.
Tout cela est bien terminé. La reconnaissance par Moscou de Louhansk et de Donetsk a tué les accords de Minsk.
L’amertume et les récriminations de Vladimir Poutine viennent de loin. Et on peut au moins donner au président russe le crédit d’être constant dans ses exigences et ses désirs.
