Un premier tableau d’acuité visuelle en alphabet autochtone
Radio-Canada
Un ophtalmologiste et un médecin de l'Université McGill ont développé le tout premier tableau d'acuité visuelle en syllabaire autochtone – un alphabet utilisé en inuktitut, en cri et en ojibwé –, afin d'améliorer l'accès aux soins oculaires des Premières Nations et des Inuits du Canada.
Dans le cadre de leur travail à Puvirnituq, un village nordique du Nunavik, le Dr Christian El-Hadad et le Dr Nishaant (Shaan) Bhambra ont remarqué que plusieurs patients ne lisaient que l'inuktitut, ce qui rendait ardue leur compréhension des tests d'acuité visuelle traditionnels.
L'acuité visuelle, qui est essentiellement la clarté de la vue, est mesurée par la capacité pour une personne d'identifier des lettres ou des chiffres à partir d'une distance spécifique.
Au Nunavik, de nombreux patients étant unilingues Inuktitut avaient de la difficulté à lire les lettres latines utilisées dans nos tableaux traditionnels. [...] Nous estimons que près de 85 % des 260 000 Canadiens autochtones utilisent le syllabaire autochtone comme système d'écriture, a expliqué par courriel le Dr Bhambra.
Les deux chercheurs ont ainsi voulu démontrer que les mesures de l'acuité visuelle effectuées à l'aide de l'alphabet maternel d'une personne peuvent donner des résultats égaux ou meilleurs.
En se basant sur un échantillon de patients du Centre universitaire de santé McGill qui lisaient l'inuktitut et l'anglais, ils ont constaté que la majorité obtenait un score égal ou supérieur lorsqu'ils utilisaient le tableau en inuktitut par rapport à celui en alphabet latin.
C'est la première fois qu'un tel tableau est conçu au Canada. Avant son élaboration, les personnes qui ne maîtrisaient pas l'alphabet latin pouvaient recourir à un tableau appelé Tumbling E en indiquant l'orientation de la lettre E, une méthode généralement réservée aux patients analphabètes.
Nous avons estimé que fournir un tableau d'acuité visuelle dans les alphabets autochtones respectait la culture et la langue uniques des Canadiens autochtones et évitait un sentiment péjoratif d'analphabétisme, a précisé le Dr Bhambra.
« Nous espérons offrir un accès équitable aux communautés autochtones du Québec et du Canada, d'autant plus que le droit de se faire servir en langue inuite est légalement requis dans les services publics du Nunavut. »