Tribunal spécialisé en violence sexuelle : inquiétudes de l’opposition à Québec
Radio-Canada
La promesse de créer un tribunal spécialisé pour les victimes d'agression sexuelle ou de violence conjugale paraît désormais fragile, au moment où les trois partis d'opposition jugent nécessaire de s'unir pour afficher publiquement leur « grande préoccupation » quant à la tournure des événements.
Dans les rangs de l'opposition, on craint que le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, parrain du projet de loi 92, s'arroge le privilège de déployer à géométrie variable le futur tribunal, c'est-à-dire dans telle région, mais pas dans telle autre, créant ainsi des disparités régionales sources d'iniquité.
On s'inquiète aussi de la résistance du ministre à inscrire dans la loi l'obligation pour tous les intervenants, et pas seulement les juges, de suivre une formation.
On se demande aussi pourquoi le ministre insiste pour procéder dans un premier temps en mettant sur pied des projets pilotes qui pourraient durer des années, et on s'inquiète de constater qu'il ne semble pas pressé de fixer un échéancier de réalisation de l'ensemble du projet.
Dans une démarche transpartisane, trois députées de l'opposition – la péquiste Véronique Hivon, la libérale Isabelle Melançon et la solidaire Christine Labrie – ont tenu à tirer la sonnette d'alarme, jeudi, dans le cadre d'un point de presse, en marge de l'étude article par article du projet de loi 92, qui a débuté mardi.
Le ministre se garde la possibilité de ne pas déployer le tribunal spécialisé sur l'ensemble du territoire du Québec. C'est quelque chose qui nous inquiète beaucoup, a commenté Mme Hivon, disant vouloir voir dans le projet de loi des garanties que ce tribunal sera présent dans tous les districts judiciaires du Québec, pour éviter de favoriser une justice à deux vitesses au service de deux catégories de victimes.
La députée Isabelle Melançon a insisté sur l'importance pour les victimes que les intervenants impliqués à toutes les étapes du processus reçoivent la formation appropriée à ce genre de cause. Elle veut voir une liste des intervenants visés inscrite dans le projet de loi, mais soutient que le ministre est fermé comme une huître à cette suggestion.
Le projet de loi mentionne une formation obligatoire pour les juges, mais les trois députées veulent qu'elle s'étende aussi aux procureurs et aux policiers, notamment.
Je pense qu'on doit envoyer un signal clair à savoir qui devra recevoir une formation, pas uniquement les juges, a-t-elle fait valoir.