
Les JO et le chauvinisme canadien
TVA Nouvelles
Je ne suis plus capable de suivre les Jeux olympiques tels que racontés par les médias canadiens. Sans doute est-ce l’âge: je ressens une profonde nostalgie pour l’époque où les commentateurs ne s’intéressaient pas qu’aux performances de «nos» athlètes, mais aussi à celles des athlètes de partout dans le monde qui excellaient dans leur sport, autant et souvent mieux que les nôtres.
Il est tout à fait normal d’être un peu chauvin. Tout à fait sain et juste de rendre hommage et de s’attacher aux Canadiens qui se sont entraînés pendant des années pour arriver à Paris en 2024.
J’en suis. Lorsque j’ai eu la chance d’assister à la finale du saut en hauteur au Stade olympique en 1976, je faisais comme les dizaines de milliers de personnes présentes: j’encourageais Claude Ferragne et Greg Joy.
Toutefois, la beauté des Olympiques, c’est la présence d’athlètes de partout, dont les meilleurs au monde, qu’autrefois on s’échinait à nous faire découvrir. C’est beaucoup moins le cas aujourd’hui. Les projecteurs sont mis presque exclusivement sur les Canadiens et les Québécois, qu’ils arrivent premiers, quatrièmes ou derniers.
Oui, il faut applaudir lorsque l’équipe canadienne féminine de gymnastique se qualifie pour la finale. Mais ne devrions-nous pas aussi tout nous dire sur la performance exceptionnelle et émouvante de la championne mondiale, Simon Biles ou de sa successeure probable, Suni Lee?
On le fait un peu, parce que leur domination est telle qu’elle ne laisse pas de choix aux commentateurs. Mais des gymnastes italiennes (argent) et brésiliennes (bronze), on ne nous dit presque rien. Même constat du côté natation, escrime, judo. «Aujourd’hui, que surveille-t-on aux Jeux?» demande l’animateur de l’émission matinale. La réponse porte uniquement sur les Canadiennes et les Canadiens en compétition ce jour-là.
On rétorquera que tous les pays font la même chose. Peut-être. Les Américains sont sans doute les champions toutes catégories du chauvinisme. Pourtant, quand je regarde les Jeux à la télévision américaine, je constate qu’on trouve du temps pour nous parler des athlètes qui remportent l’or, l’argent et le bronze, même lorsque ceux-ci ne sont pas Américains.
Un virage a été pris au Canada il y a quelques années. Les médias ont décidé, à juste titre, de rendre hommage à nos athlètes à nous, même si ceux-ci sont relativement peu nombreux sur le podium. Bravo! Ceux qui ne gagnent pas de médaille ont aussi un immense mérite, il faut le dire. Mais ce n’est pas seulement vrai pour les Canadiens.
Autre chose: la couverture olympique canadienne est caractérisée par un marathon de paroles, de reportages «humains» et touristiques. Les compétitions sportives elles-mêmes, qui devraient occuper toute la place, n’en prennent qu’une très relative. Faites le test: allumez votre téléviseur à une heure de grande écoute, et syntonisez un poste offrant la couverture des Jeux: vous tomberez presque immanquablement sur du placotage ou sur de la publicité. Suis-je seul à penser que les Olympiques, c’est d’abord et avant tout du sport international de haut niveau?
