La coop de ma mère : une exploration intimiste de la propriété collective
Radio-Canada
Dire qu’Ève Lamont est une artiste engagée serait un pléonasme. Au cours des trois dernières décennies, la réalisatrice québécoise a abordé dans ses documentaires et œuvres expérimentales bon nombre d'enjeux relatifs à la justice sociale, comme l’exploitation sexuelle, les conditions de travail en agriculture ou l’embourgeoisement de quartiers populaires. Son plus récent projet, La coop de ma mère, porte sur le droit au logement.
Il s’agit d’un sujet qui a une résonance particulière pour Ève Lamont. Elle l’avait déjà en partie exploré par le passé, dans son documentaire Squat! (2002). De plus, la problématique de l’accès au logement affecte directement un membre de sa famille, en l’occurrence sa mère, comme l’indique le titre de son nouveau film.
Ça faisait un bout de temps que je voulais porter mon regard sur le modèle coopératif en habitation, explique Ève Lamont au micro de Tout un matin. Le fait de braquer ma caméra sur la coop Saint-Louis, où vit ma mère, s'est révélé être un incontournable parce que j’y ai rencontré des gens assez extraordinaires.
La coop de ma mère est une incursion intimiste dans la vie d’une quarantaine de membres d’une coopérative de Gatineau, où le film a eu sa première, le 9 octobre. Tous ces gens forment un bouillon interculturel et intergénérationnel, une micro-société qui appelle à un meilleur vivre-ensemble, résume la cinéaste.
Il y a plusieurs personnages qui démontrent bien comment la coopérative permet de trouver un lieu confortable où on peut vivre en sécurité. Il y a un réfugié qui a quitté la guerre en Somalie quand il était adolescent, une autre réfugiée qui a quitté la répression colombienne avec sa famille, un père plus âgé qui retombe sur ses pattes suite à un divorce…
Et ce qui a mené la mère de la réalisatrice, Rachel Gaudreau, à rejoindre cette communauté? Un propriétaire véreux. Ma mère, c’est une militante de longue date, elle provient d’une génération qui a eu besoin de s’émanciper, qui a lutté toute sa vie pour le droit des femmes, le bien commun. Se retrouver dans une coopérative, c’était comme une suite logique pour elle, affirme Ève Lamont.
Même si le film est cantonné dans un lieu restreint, il examine diverses questions qui concernent la société québécoise dans son ensemble, comme le vieillissement de la population ou la diversité sociale. La formule coopérative en habitation c’est formidable pour les personnes âgées ou handicapées, parce qu’au lieu de se retrouver dans une résidence privée pour aînés, ou dans un CHSLD, c’est beaucoup mieux que ces personnes puissent vivre dans un milieu de vie intergénérationnel tout en bénéficiant de services à domicile, souligne Ève Lamont.