Elle revisite la grande tradition picturale en remplaçant les hommes par des animaux
Radio-Canada
Effacés, les angelots, Marie, Jésus et autres figures religieuses! Crystal Deer les a remplacés par des chèvres, boucs et hiboux tout en conservant la composition classique des tableaux d’origine dont elle s’inspire. « Je suis plus attachée aux animaux qu’aux gens », résume-t-elle. Foi d’artiste en début de carrière.
Née en 1990, Crystal Deer est une artiste multidisciplinaire de Kahnawake, annonce le programme de l’exposition Masters Revised (Les Maîtres révisés), à l’affiche de la Galerie Shé:kon jusqu’au 11 mars, à Montréal. Une vingtaine de peintures et sept dessins y sont exposés, fruit de plusieurs années de travail pour cette artiste émergente à découvrir.
Derrière l’appréhension d’accueillir son premier public le jour du vernissage, samedi, Crystal Deer affiche l’aplomb des artistes qui savent ce qu’ils veulent, et valent. Sur le choix des grands maîtres romantiques et baroques dont elle révise un florilège de chefs-d'œuvre? J’aime leur travail mais je me dis que j’aurais préféré que ce soit avec des animaux. Il suffisait d’y penser.
Un buffle toise le spectateur telle une Madone altière dans une étole chatoyante. Dans un autre tableau, un hibou surplombe une scène religieuse en remplacement de Marie. Le titre Madona in Glory Revised incite le spectateur à retrouver sur Google la version originale et à comparer les deux. L’exercice se décline très bien avec les autres tableaux. Entre l’original et la version Deer, impossible de ne pas sourire.
Lumières, compositions, respect des pigments…Le travail académique a été peaufiné au Collège Dawson où Mme Deer a suivi ses études en beaux-arts, puis à l’Université Concordia où elle a obtenu un baccalauréat en arts plastiques et lié des amitiés artistiques qui lui permettront, un temps, de travailler dans un studio collectif.
D’un coin de l'œil, elle scrute le public et se demande si l’un de ses professeurs viendra lui rendre visite le jour du vernissage. Beaucoup l’ont encouragée, à raison, mais il y en a un qui l’a particulièrement inspirée. Guiceppe di Leo! prend-elle le soin d’écrire en soulignant son nom. Très traditionnel, très technique. Peut-être lui doit-elle sa maîtrise des voluptueux nuages et des pelages d’animaux dont elle exprime très bien la texture.
Quand elle évoque son exposition, Crystal Deer laisse transparaître sa passion, mais aussi son intransigeance et sa minutie. Certains tableaux, comme Hagar in the Desert revised, ont nécessité au moins 150 heures de travail, raconte la peintre. Elle s’est essayée à la technique de la tempera à l'œuf qui remonte à l’antiquité. Plus jamais!, lance-t-elle.
Pour l’heure, ses pièces ne sont pas à vendre, prend-elle le soin de préciser, car la série n’est pas achevée. Quant à l’influence autochtone dans son art, l’artiste mohawk n’y voit aucun rapport avec son travail.
« Les chèvres et les hiboux, ça ne vient pas de notre culture. »