Épidémie de kidnappings à Haïti : une preuve de la « faillite de l’État »
Radio-Canada
L’enlèvement de 12 missionnaires et de 5 de leurs enfants à Ganthier, à l’est de la capitale Port-au-Prince, n’est que la plus récente preuve de la déliquescence de l’État haïtien, affirme la journaliste et autrice Emmelie Prophète.
On ne peut pas parler de la faiblesse de l’État, mais de la faillite de l’État. L’État haïtien a complètement perdu le contrôle du territoire, a fait valoir l’écrivaine, qui a récemment publié Les villages de Dieu, racontant la vie dans des bidonvilles transformés en zone de non-droit.
Selon elle, cette faillite s’est particulièrement mise en œuvre dans la foulée des élections de 2011, qui a donné lieu à une intervention grossière et visible des États-Unis pour imposer un président [Michel Martelly, NDLR] pour manipuler les élections.
Depuis lors, il y a un désordre permanent dans le pays, des protestations, beaucoup de bruit. L’État s’est enlisé entièrement, a-t-elle expliqué en entrevue à l’émission Tout un matin.
Des gens d’argent ont armé des jeunes pauvres des quartiers populaires et ils ont perdu le contrôle de ces jeunes gens. Pas seulement les gens d’argent, les politiques aussi. Ils ont financé ces gangs, et maintenant, ces gangs sont hors de contrôle.
Ces bandes armées se financent de plus en plus par des enlèvements. Le Centre d'analyse et de recherche en droits de la personne, basé dans la capitale haïtienne, recense plus de 600 enlèvements lors des trois premiers trimestres de 2021, contre 231 à la même période en 2020.
Il y a une industrialisation du crime. Il y a beaucoup de gens, des jeunes particulièrement, des quartiers défavorisés, qui ont des armes, et qui enlèvent des personnes au hasard dans les rues de Port-au-Prince, relate l’autrice haïtienne, qui vit elle-même dans la capitale.
