
Élections en Turquie : « C’est l’avenir de la démocratie qui est en jeu »
Radio-Canada
Le 14 mai, les Turcs élisent leur président et leurs députés lors d'élections qui pourraient déloger Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis 2003.
Les derniers sondages donnent une légère avance, de 2 % à 4 %, au candidat de l’opposition, Kemal Kiliçdaroglu, qui mène par 49,3 % des intentions de vote au premier tour, contre 43,7 % pour M. Erdogan.
Régnant sans partage depuis 20 ans, le président turc est victime de l’usure du pouvoir, estime Jean Marcou, directeur du Master Méditerranée-Moyen-Orient à l’Institut d’études politiques de Grenoble, joint au téléphone. Ses décisions, de plus en plus autoritaires et nationalistes, lui ont aliéné l’appui des classes libérales et éduquées, observe-t-il.
La crise économique et l’inflation galopante joueront également dans le choix des électeurs, qui considèrent M. Erdogan comme responsable.
La situation économique actuelle tient à des paramètres que la Turquie ne maîtrise pas toujours, relève M. Marcou, mais elle tient aussi à des décisions de M. Erdogan, notamment le fait de vouloir maintenir une croissance très élevée et d'essayer d'exporter au maximum, au détriment de certains fondamentaux économiques, en expliquant que la mayonnaise va finir par prendre. Mais le problème est qu'elle n'a pas pris et qu’aujourd'hui, les ménages turcs sont dans une position très incertaine.
L'inflation a atteint 44 % sur un an en avril, après un sommet de 85 % en octobre 2022, et la livre a perdu 60 % de sa valeur face au dollar au cours des deux dernières années.
« Les Turcs ont connu une situation économique meilleure et ils sont inquiets pour leur avenir. »
La gestion du tremblement de terre du 6 février, qui a causé plus de 50 000 morts dans le sud de la Turquie, pourrait également jouer un rôle dans le choix des électeurs. On reproche à son gouvernement d’avoir fermé les yeux sur des irrégularités dans l’application de la réglementation antisismique, ainsi que la lenteur des secours après la catastrophe.
Le séisme a terni l'image du gouvernement, qui n'a pas été assez réactif, remarque Bayram Balci, chercheur au CERI-Sciences Po, ancien directeur de l'Institut français d'études anatoliennes d'Istanbul. Objectivement, il ne pouvait pas l'être, parce que le séisme a eu des proportions inouïes : des villes entières sont retrouvées par terre. Mais, que ce soit de sa faute ou pas, ça a eu un effet négatif sur son image.
