« Leur magot, ils l’ont investi dans des armes à feu »
Radio-Canada
Depuis quelques mois, les langues ne se délient pas facilement dans la rue. Parler à un journaliste est un exercice périlleux. « Tu dis mon nom, c’est terminé pour moi, me dit l’un d’entre eux. Je pourrais me faire tirer parce que je serais vu comme un snitch [délateur]. »
Toutes les personnes rencontrées dans le cadre de ce reportage nous ont parlé sous le couvert de l’anonymat.
Un individu qui était auparavant affilié aux gangs observe à quel point il est aujourd’hui facile d’obtenir des armes à feu. N’importe quel gars du hood peut s’acheter tous les guns qu’on voit dans les films, dit-il.
Jusqu’à maintenant, le SPVM comptabilise 15 homicides perpétrés avec des armes à feu, comparativement à 5 l’an dernier.
Au cours des années 2000, la métropole avait connu son lot de violences liées aux gangs de rue. Mais à l’époque, les armes à feu étaient réservées à un cercle restreint de membres.
C’était le festival du jack [couteau], ajoute-t-il. Ça finissait généralement à l’hôpital, mais ça ne faisait pas les nouvelles. Sinon, on avait des fusils coupés de calibre 12, qui font des dommages, mais qui ne tuent pas nécessairement, parce qu’ils ne sont pas précis. Aujourd’hui, les gars ont des armes automatiques.
Et ces armes se retrouvent dans les mains de personnes de plus en plus jeunes, observe un membre actif d’un gang. Avant, pour avoir un gun, il fallait avoir de l’expérience. C’était les gars dans la vingtaine qui s’en servaient pour faire la guerre. Maintenant, c’est pas rare de voir des gars de 14 ans qui sont strapped [armés].
En moyenne, se procurer une arme de poing coûte de 3000 $ à 5000 $, selon nos sources. Si la somme peut sembler importante pour le commun des mortels, dans la rue, les occasions de faire de l’argent se multiplient et se démocratisent.
Avec la fraude, c’est facile de faire ça en une journée, m’explique un homme qui n’est plus criminellement actif aujourd’hui, mais qui n’a pas tourné le dos au milieu. Il y a 20 ans, il fallait avoir des contacts, notamment chez les motards, pour faire de l’argent. Aujourd’hui, n’importe quel "ti-coune" avec un laptop peut s'enrichir.